Cooper T40 : La petite anglaise qui voulait battre les géants

Philippe
25 juin
2 min de lecture

Dernière mise à jour : 26 juin

À l’été 1955, la Formule 1 respire encore l’aristocratie des moteurs avant : Mercedes W196, Ferrari 625, Maserati 250F… Dans les paddocks d’Aintree, une silhouette menue, toute en rondeurs sobres, suscite d’abord des sourires amusés. Longue d’à peine 3,70 m, posée à ras du sol, la Cooper T40 – dérivée du « Bobtail » de sport – affiche le culot d’un châssis tubulaire logeant son six-cylindres Bristol à l’arrière, juste derrière le pilote. John et Charles Cooper ne cherchent pas (encore) à faire école : ils veulent simplement aller vite avec un budget d’atelier.

Sous la peau d’aluminium, le bloc 1 971 cm³ ne revendique que 130 ch à 5 800 tr/min, mais l’ensemble ne pèse guère plus de 450 kg : rapport poids-puissance et motricité font la différence. À plus de 220 km/h en pointe, la T40 file, vive, là où les monocylindres à l’avant luttent contre l’inertie. Jack Brabham, tout juste arrivé d’Australie, en tire l’essence même : trajectoires tendues, freinage tardif, accélération fulgurante. Si l’embrayage cède au 30ᵉ tour, la graine est semée : la F1 peut – et va – basculer.

Dans la foulée naîtront les Cooper T43 et T51 : premières championnes du monde à moteur arrière (1959-1960) et tremplin vers l’empire Lotus, McLaren et consorts. La T40, elle, reste l’étincelle ; un manifeste de légèreté et de logique mécanique. À peine deux ou trois exemplaires subsistent aujourd’hui, chacun portant les stigmates romantiques de l’ère artisanale : rivets apparents, leviers de vitesses dégainés, volant en bakélite poli par l’adrénaline.

Dans l’ombre, un privilège personnel

Il y a quelques jours, j’ai eu l’honneur de veiller sur l’un de ces rescapés, le temps de son stockage confidentiel avant départ. Rentrer le museau d’une T40 dans un camion capitonné, tendre les sangles, vérifier la pression des pneus, c’est toucher du doigt le fragile fil reliant l’ingéniosité d’après-guerre à notre présent de passionnés. L’espace d’un instant, on devient passeur d’histoire : celui qui s’assure que la révolution silencieuse des Cooper continue de vibrer, moteur froid ou chaud, dans la mémoire collective.